Publié le 30 septembre 2021

Le mot du philosophe / Beau


"Le beau n'est pas simplement l'objet d'un bizarre plaisir d'esthète, mais ce qui nous ouvre les yeux à l'être..." Quelle actualité !


L’esthétique moderne, depuis Kant, essaye de situer la beauté en dehors du bien moral et du vrai rationnel, eux-mêmes dissociés l’un de l’autre. Elle serait le domaine d’un plaisir sans rapport à nos intérêts. C’est insoutenable pour l’architecture, dont la beauté est inséparable de son dévouement aux plus nobles fonctions de la vie en société, tout comme la beauté d’une Madone est inséparable de l’émotion causée par la révélation de l’amour. Hugo parle au sujet de Raphaël de « cette naïveté idéale (…) au point d’intersection mystique de la virginité, de la maternité et de la divinité. » La beauté, c’est tout simplement l’harmonie en tant que délectable, et l’harmonie, c’est l’objet de la raison, aussi bien théorique que pratique. Comment donc l’esthétique constituerait-elle un domaine à part, séparé de la logique et de la morale, sans perdre de son sérieux ? Et sans que, réciproquement, soit induit un dessèchement de la raison en rationalisme et de la morale en moralisme ? 

Le beau n'est pas simplement l’objet d’un bizarre plaisir d’esthète, mais ce qui nous ouvre les yeux à l’être, ce qui nous rend la nature, la vie, la droite raison, l’harmonie, ce qui nous fait prendre place dans l’harmonie du cosmos, ce qui ôte à notre esprit les œillères d’une science d’inhumain pouvoir et d’une philosophie d’inhumaine liberté.

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