Les escapades de Jean-Pierre / L'abbaye de Sénanque

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C'est un joyau de l'architecture cistercienne que nous fait visiter ce mois-ci l'ami Jean-Pierre : en route pour l'abbaye de Sénanque !
 

L’Abbaye de Sénanque est située dans le Vaucluse en région Provence-Alpes-Côte d'Azur à deux kilomètres du village de Gordes. Elle a été fondée en 1148 par des moines cisterciens venus de Mazan en Ardèche. Elle est la quatrième abbaye cistercienne fondée en Provence après Le Thoronet, Aiguebelle et Silvacane.

Les Cisterciens sont une branche de l'ordre monastique catholique romain fondée en 1098 par Robert de Molesme, Alberic et Stephen Harding, avec l'intention de revenir à une vie monastique plus stricte et plus rigoureuse, en suivant les principes de la Règle de Saint Benoît. Cette règle a été rédigée par Saint Benoît de Nursie au VIe siècle et est devenue le fondement de la vie monastique en Occident.

La Règle de Saint Benoît est un ensemble de préceptes qui détaillent la vie communautaire et la discipline personnelle des moines. Elle met l'accent sur la prière, le travail manuel, l'obéissance, la stabilité dans un monastère spécifique, et la modération dans tous les aspects de la vie.

Les Cisterciens ont émergé comme une réforme de l'ordre bénédictin en réaction à ce qu'ils percevaient comme un relâchement des pratiques monastiques. Ils ont cherché à revenir à une observance plus stricte de la Règle de Saint Benoît, mettant l'accent sur la simplicité, le travail manuel, la prière et l'isolement des centres urbains.

Ils ont adopté une vie plus austère que les autres ordres monastiques de l'époque. Ils ont renoncé aux possessions matérielles superflues, ont promu le travail manuel comme moyen de subsistance et ont favorisé la solitude et la contemplation dans leurs monastères, souvent situés dans des régions isolées.

Les Cisterciens ont également influencé l'architecture religieuse avec leur style sobre et fonctionnel. Leurs églises et monastères étaient souvent construits selon des principes d'austérité, caractérisés par des lignes simples, des formes géométriques épurées et un manque d'ornementation.

Malgré leur vie austère, les Cisterciens ont connu une croissance rapide et ont établi de nombreux monastères à travers l'Europe occidentale au cours du Moyen Âge. Leur influence s'est étendue à de nombreux domaines, y compris l'agriculture, l'économie et la spiritualité.

Édifiée selon le style architectural caractéristique de l’ordre Cistercien la construction de Sénanque a duré une soixantaine d’années. Le site a été choisi pour son isolement, propice à une vie monastique contemplative car la région, avec ses collines et ses vallées offrait un refuge spirituel idéal. En effet, l’emplacement correspond parfaitement aux prescriptions de l’ordre qui précisent « on ne doit construire aucun monastère dans les villes, les bourgs et les domaines ruraux ».

Saint Benoît demande à ce que « le monastère détienne toutes les choses nécessaires : eau, moulin, jardin, boulangerie et les divers métiers en sorte que les moines n’aient aucune nécessité de courir au-dehors, ce qui n’est aucunement avantageux à leurs âmes. »

L’Abbaye est à son apogée du XIIIème au XIVème siècle. Elle possède quatre moulins, sept granges, un hôpital à Arles... Une quarantaine de frères y sont abrités. Avec la guerre des religions, en 1544, une partie du monastère est incendié, le réfectoire, la fontaine du cloître et le bâtiment des convers sont détruits ainsi que les archives, et les moines auraient été pendus. Après beaucoup de péripéties qui ont vu les moines être chassés puis autorisés à revenir, le lieu leur est rendu en 1969, et une campagne de réhabilitation et de restauration est entreprise.

Les bâtiments ont été quasiment conservés dans leur intégralité hormis celui des frères convers qui a été détruit pendant les guerres de religion. Ces derniers, appelés sœurs converses pour les moniales, sont les membres des ordres religieux catholiques chargés principalement des travaux manuels et des affaires séculières d'un monastère.

Sénanque est considérée comme un joyau de l’architecture Cistercienne. Posé dans le creux du vallon, surgit une grande bâtisse tout en pierre qui donne le sentiment qu’elle a toujours existé. On a une impression de force, d’intemporel, d’éternité. Ce qui vous frappe aussi ce sont ces immenses champs de lavandin cultivés par les moines, très denses et leur couleur bleue particulière.

On retrouve les caractéristiques habituelles des constructions cisterciennes faites de dépouillement et de symbolique, les lieux saints ne devant recevoir aucun décor sculpté ou orné, et la couleur devant être réservée aux enluminures. Ainsi, les oculi reçoivent des vitres blanches sans croix et sans couleurs. Aux tympans des portails et aux chapiteaux, aucune sculpture car rien ne doit détourner la pensée de l'idée de Dieu.

A l’intérieur de l’église abbatiale construite en forme de croix latine, une fois de plus, je suis frappé par le dépouillement et par la lumière qui jaillit à l’intérieur, comme voulu par les moines pour seul symbole de Dieu.

On retrouve ensuite les salles traditionnelles, avec le dortoir des moines, le chauffoir, la salle du chapitre très bien conservée, et enfin, le cloître.

Ce dernier, plus grand que celui du Thoronet, est une cour intérieure avec quatre galeries ouvertes par douze arcades sur un très beau jardin.

L’Abbaye abrite encore une petite communauté de moines soumise à la règle de Saint Benoit encore en vigueur qui, sept fois par jour la rassemble pour prier en commun à partir des psaumes et de la Bible.  A Sénanque la règle a été quelque peu allégée, car à l’origine, il y avait huit prières dont sept de jour et une de nuit.

A l’intérieur du monastère, les visites sont guidées afin de préserver la vie de prière et de recueillement des moines. Il est possible d’y séjourner au maximum huit jours pour des personnes désirant partager la vie de prière de la communauté.

Pour terminer la visite, je vous invite à passer par la boutique qui accueille de nombreux produits monastiques, fabriqués artisanalement par différentes abbayes. Si les ressources de la communauté permettent de faire face à l’entretien courant, elles ne peuvent couvrir l’ensemble des travaux de restauration. Vos achats sontt un soutien à la communauté pour lui permettre de vivre de son travail et assurer le financement d’une partie des travaux.

Après avoir visité l’Abbaye, je vous invite à aller découvrir le petit village de Gordes qui est un des plus visité du Parc naturel régional du Luberon. Il est situé en haut d'un piton rocheux juste en face de la montagne du Luberon. Dans des rues assez pentues au sol pavé de galets, vous pourrez y découvrir, entre autres, l’aumônerie Saint-Jacques, qui est une ancienne auberge pour les pèlerins de Compostelle. Arrivé au sommet, la vue panoramique est absolument magnifique.

Je vous conseille aussi d’aller découvrir le très typique moulin à huile seigneurial qui a fonctionné jusqu’à la Révolution Française.

Bonne découverte.