Les escapades de Jean-Pierre / Le monastère de Saorge
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Le Monastère de Saorge
Le Monastère de Saorge est situé sur le canton de Contes dans les Alpes-Maritimes. Saorge est un petit village médiéval avec une architecture particulièrement bien conservée. Il est classé et fait partie des plus beaux villages de France. C’est une ancienne forteresse bâtie au flanc de la montagne au-dessus des gorges de la Roya. Dans le passé, Saorge était défendu par trois châteaux qui formaient une place forte à la réputation d’être imprenable.
Deux routes, qui ne sont pas reliées, permettent d’accéder au village qui est entièrement piétonnier. Ce qui frappe, lorsqu’on aperçoit Saorge, c’est cette densité des habitations et leur hauteur. De plus de trois mille habitants en 1793, le village n’accueille plus que 460 personnes.
Saorge est un des points importants de la Route du Baroque et des orgues historiques de la Vallée de la Roya qui datent du XVIIe au XIXe siècle. Ce patrimoine a été classé et restauré dans les années 1980 avec l’aide d’organistes. Je vous invite, à l’occasion, à aller visiter une exposition permanente sur les orgues à la Brigue, dans la Maison du Patrimoine.
Le Monastère est un peu en dehors du village et son accès se mérite, au bout d’une montée de 200 mètres dont les 100 derniers en calade de galets. A l’origine existait un ancien couvent fondé par les pères franciscains en 1633. Puis la commune de Saorge mis à disposition des terrains pour la construction du Monastère à l’écart du village, qui s’est achevée en 1662.
Le monastère de Saorge a été construit par les pères franciscains dans un style architectural baroque. Celui-ci est né en Italie au début du XVIIe siècle pour se répandre ensuite dans l’Europe entière. Ce qui caractérise ce style c’est la profusion de couleurs, de formes et de matériaux. Les stucs sont beaucoup utilisés dans les églises pour créer des décorations en relief. Il y a beaucoup d’angelots dans les décors, les vitraux n’occupent plus une place privilégiée et sont souvent de couleur claire.
L'ordre des Frères mineurs (O.F.M.) a été fondé en 1210 par saint François d’Assise, le nom de "frères mineurs" faisant référence aux « plus petits d'entre nous » dont parlent les Évangiles.
Cette inspiration de saint François d’Assise vient de sa contemplation de «la Présence humble et cachée » du Christ, sur la Croix et dans l’Eucharistie.
Cet état de « minorité » permet d’éviter tout sentiment de supériorité, afin de pouvoir vivre la fraternité en Jésus-Christ par la charité avec les autres. Ainsi, si les franciscains doivent être justes, ils ne doivent pas revendiquer des « droits », mais aimer leurs frères, avec respect, compréhension et miséricorde.
En vertu de deux bulles du pape Clément VI, depuis 1342, les franciscains revendiquent la « garde des Lieux saints » ainsi depuis le XIVème siècle ils sont les gardiens de nombreux sanctuaires en Terre sainte dont le Saint-Sépulcre à Jérusalem.
Les Franciscains ne sont pas des moines. Ils mènent une vie à la fois contemplative et active. Ils s’appellent frères entre eux, même si plusieurs sont aussi prêtres. Leurs valeurs sont la pauvreté, la simplicité, l’humilité, la justice, et l’émerveillement face à Dieu, aux personnes et à toute la création. Ils s’adonnent à toutes sortes de travaux : pastoral, social, communautaire, éducatif, missionnaire.
Comme la plupart des édifices religieux, le Monastère a une histoire tumultueuse qui a vu la communauté de moines être chassée après la révolution française, puis revenir de 1824 jusqu’en 1903. Après cette date le Monastère a périclité et n’a plus été occupé jusqu’en 1969 où une communauté de frères franciscains y est revenue jusqu’en 1988. L’Etat français a racheté le bâtiment en 1967 et a procédé, depuis, à de nombreuses restaurations.
Une très importante campagne de travaux a été menée depuis 2020 concernant les toitures, l’intérieur, l’extérieur de l’Église. A l’intérieur de l’Église les décors ont été restaurés, et la restauration des neufs médaillons a permis de mettre au jour des décors que l’on peut attribuer à Calderi de Lugano datant de 1760. Vous y admirerez le chemin de croix qui est l’un des plus anciens chemins de croix peints sur toile de la région niçoise dans de très beaux et très rares tons de bleu.
Vous pourrez admirer le Christ à la colonne en bois peint, daté fin du XVIIème siècle qui est la plus belle œuvre du couvent. L’arrière de la statue étant aussi sculptée, on pense que celle-ci devait en fait occuper une place centrale pour que les fidèles puissent tourner autour.
Le retable du maître-autel en noyer a vu sa polychromie remise en état et des ornements qui avaient disparus comme les angelots et les fruits qui ont pu être miraculeusement reconstitués à l’identique grâce à une photo ancienne. Il constitue la pièce maîtresse de la mise en scène de la liturgie. Le maître-autel, en marqueterie de marbre, a été construit par un artisan de San Remo et a été consacré en 1732.
De part et d’autre de l’autel, deux portes conduisent au chœur des frères, retranchés derrière le retable principal ce qui est rarissime en France. Ils pouvaient ainsi suivre l’office sans être vus des fidèles ; leurs chants se propageaient à travers le détourage inséré dans le retable.
Dans le cloître et le réfectoire ont été peints aux XVIIe et XVIIIe siècles des fresques sur la vie de saint François d’Assise. Celles de la galerie Nord ont pu bénéficier de la campagne de restauration et retrouver ainsi tout leur éclat d’antan. Peintes par Calderari de Lugano dans les années 1760, elles constituainet un support pour l’enseignement et la méditation pour les novices.
A l’intérieur dans la cour, vous pourrez découvrir neuf magnifiques cadrans solaires peints datant des XVIIe, ensemble très rare dans la région.
A l’extérieur a été construit un splendide et spacieux jardin en terrasses comprenant un verger et un potager.
Depuis 2001 une nouvelle affectation du bâtiment a été réalisée et ce dernier est maintenant destiné à recevoir des artistes pour leurs besoins de retraites propices à leurs créations artistiques. Ainsi des rencontres, des expositions, des séminaires y sont organisés. Les artistes peuvent être logés dans les anciennes cellules des franciscains et bénéficier d’espaces collectifs réaménagés (cuisine, bibliothèque, salon, salles de bain, jardin).
Du 1er avril au 30 septembre, la résidence accueille des écrivains, des traducteurs, des scénaristes, des compositeurs de musique de tous les pays, à la recherche de calme et de concentration. De mars à octobre, ce sont des compagnies du spectacle vivant qui sont accueillies. En contrepartie les auteurs sont conviés à participer à une rencontre avec le public.
Je tiens à remercier très chaleureusement Estelle Arnould Chargée d’action culturelle, éducative et communication au Centre des Monuments Nationaux et Francesco notre guide accompagnateur intarissable sur l’histoire du Monastère.